Après avoir introduit la série hier (ici), voici la défense du continuationnisme (i.e. la position charismatique) par Nathan Lambert, pasteur stagiaire en Angleterre.
I - Rien de ce qui était vécu au temps du Nouveau Testament ne s'est arrêté
Ma croyance principale est celle-ci : tout ce qui a été vécu dans les temps du Nouveau Testament est pour nous aujourd'hui.
a. Le silence du Nouveau Testament
Je ne vois aucun passage dans le NT qui affirme que les choses qu'ils vivaient devaient s'arrêter.
b. Le but des dons
Le but des dons de l'Esprit décrits dans la Bible (Rom 12, 1 Cor 12) et des ministères translocaux (Éph 4) est d'édifier l'Église (dons) et de poser des fondements dans l'Église (ministères translocaux). Je ne vois pas pourquoi l'Église n'aurait plus besoin d'être édifiée et fondée aujourd'hui. Personne qui ait touché à l'implantation d'Église ou à la mission transculturelle parmi les peuples non-atteints ne pourra dire que les apôtres de la première génération ont fait tout le travail pour établir l'Église pour nous. Dans ces situations-là, les signes et prodiges sont des armes données par Dieu pour l'avancée de son Royaume (sans quoi la mission devient une vraie galère), et les personnes données par Dieu à l'Église sont une aide sans égale. Le vécu fréquent des dons miraculeux dans l'Église s'est arrêté au moment où celle-ci a commencé à devenir complaisante au niveau missionnaire. Or la mission ne cessera jamais jusqu'à temps que Jésus revienne pour finir lui-même la mission qu'accomplit aujourd'hui son corps.
c. Le Royaume n'est pas encore là en plénitude
Parce que le Royaume de Dieu n'est pas pleinement là, il faut donc que nous nous servions des outils que Dieu met à notre disposition pour que le Royaume continue à s'installer. Parallèlement, parce que le Royaume de Dieu est déjà en partie là, nous pouvons avoir confiance que nous avons à notre disposition les moyens d'accomplir des choses encore plus grandes que celles que Jésus a faites (Jean 14.12). N'est-ce pas en puissance que consiste le Royaume de Dieu (1 Cor 4.20) ? Certaines formes extrémistes du charismatisme ont péché du côté du "Royaume déjà là". Les cessationistes pèchent d'après moi de façon toute aussi forte du côté du "Royaume pas encore là".
d. Les arrhes de l'Esprit
Le Nouveau Testament est très clair sur le fait que nous ne vivons pas encore la plénitude de la perfection acquise par Christ. Mais il est tout aussi clair sur le fait que nous avons déjà à notre disposition l'Esprit de Dieu, comme un acompte de notre héritage futur (2 Cor 5.5). Comme cet héritage futur consiste en la corégence de toute chose avec Christ (2 Tim 2.12) et comme le règne de Christ consiste en une domination sur les puissances du mal (Éph 1.20-21), il n'est que naturel de conclure que l'acompte de cet héritage consistera aussi en puissance manifestée pour détruire les forces du mal, et emmener ce monde vers une conformité toujours plus grande au Royaume de Dieu – celui-ci étant appelé à se répandre et à grandir (Mt 13.31-32). Cette interprétation de ce que constituent (au moins en partie) les arrhes de l'Esprit est cohérent avec l'œuvre de l'Esprit, qui remplit les croyants de puissance à la Pentecôte.
e. Mon vécu personnel
J'ai personnellement eu l'occasion de prophétiser de façon extraordinairement précise ; j'ai prié pour des gens qui ont été guéris ; il m'a été donné le don d'interpréter des langues inconnues ; et j'ai chassé des démons dans le nom de Jésus.
J'ai été au bénéfice du ministère de certaines personnes qui sont données par Dieu à l'Église en tant que prophètes et j'ai vu des vies être transformées par leur ministère. Je travaille en ce moment avec quelqu'un qui a un ministère apostolique, et qui intervient auprès de mon Église pour nous assister dans notre mission. Nous pourrions faire un bon travail sans lui, mais nous faisons un meilleur travail avec lui. J'ai également vu le fruit du ministère de bien des évangélistes.
Ces personnes sont un don pour l'Église ; elles existent encore aujourd'hui, et si nous ne voulons pas nous embourber en tant qu'Églises, nous devons reconnaître et accepter leur contribution au sein de nos Églises locales, pour autant que ces personnes exercent leurs dons selon les recommandations bibliques.
f. Une exception
Il y a une chose qui selon moi s'est arrêtée aujourd'hui : la révélation parfaite de Dieu à son Église en la Bible. Le canon est clos et voici pourquoi : il devait être écrit par des personnes qui étaient témoins oculaires de Christ ressuscité, et choisis par lui, ou bien s'agir de matériel mandaté et validé par ceux-ci. Or ces personnes sont toutes mortes ! Les révélations prophétiques que nous vivons aujourd'hui sont partielles et imparfaites (1 Cor 13.9). Or je crois en la suffisance et l'inerrance de l'Écriture. Ce passage ne peut donc pas se référer à l'inspiration des Écritures.
II - Les dons doivent être vécus conformément aux recommandations de la Bible
Par exemple :
- S'il y a du parler en langue audible et public dans l'Église, il faut qu'il soit interprété (1 Cor 14.27). Si nous n'avons pas de personnes ayant le don d'interprétation, il faut se retenir de parler en langues de façon audible dans l'assemblée. C'est le seul don qui paraît être donné pour un usage privé plutôt que communautaire (1 Cor 14.2, 17).
- Le don prophétique dans le NT doit clairement être véhiculé comme étant partiel et imparfait (1 Cor 13.9), et doit donc être apporté avec ouverture et respect de la personne à qui s'adresse la parole. On ne force jamais quelqu'un à recevoir un cadeau : c'est un cadeau ! Il faut d'ailleurs que les prophéties, surtout les prophéties précises, soient soupesées dans l'assemblée (1 Cor 14.29).
- L'attitude dans l'exercice des dons doit toujours être respectueuse des personnes. C'est Dieu qui fait, et non pas l'homme. Beaucoup des "techniques" utilisées par les gens exerçant un ministère surnaturel ne viennent pas de Dieu et montrent que ces personnes, consciemment ou non, font plus confiance à la technique humaine (musique douce, cris, claquements de doigts, etc.) qu'à la puissance de Dieu. Cependant, cela n'exclut pas que Dieu demandera parfois à l'homme de faire des choses un peu étranges dans le ministère de puissance (Jean 9.6 ; 2 Rois 4.32-35). L'Esprit de Dieu agit comme bon lui-semble (Jean 3.8) ; ne le mettons pas en boîte.
- Il est sage de n'exercer les dons miraculeux que dans des contextes d'Église locale, avec la présence des anciens, qui pourront assurer un cadre sur dans lequel les uns pourront exercer les dons et les autres pourront les recevoir, sans pression ou manipulation, mais plutôt avec liberté, le cadre étant bien fixé par des personnes de confiance et d'expérience.
Conclusion
Je suis très au courant des excès du charismatisme (pour en avoir vu de très graves de mes propres yeux). Mais il faut aussi reconnaître que le non-charismatisme est un excès dans l'autre sens. Ayons de la mesure, mais recherchons ardemment les dons les meilleurs (1 Cor 12.31) au lieu de jeter le bébé avec l'eau du bain.
A demain, pour la défense de la position non-charismatique par Alex ;).