Une histoire de harcèlement à l’école (et ce que j’aurais aimé me dire à l’époque)

Je me souviens très bien de ma première année au lycée1. Si seulement j’avais fait quelque chose.

La veille de la rentrée, j’étais euphorique. Nouvelle école pour une nouvelle vie. J’avais prévu de devenir une fille cool, populaire et magnifique. Je m’imaginais déjà faire des soirées de folie, avec de la musique très forte et des gens qui rient aux éclats. Ça allait aussi être les années où je me déciderai pour mon avenir et choisirai un métier de rêve. J’étais travailleuse et je savais que j’avais beaucoup de possibilités. Alors depuis des mois je répétais à qui voulait l’entendre que j’étais grande, que j’entrais au lycée et que ça allait être merveilleux.

La réalité a été bien différente.

Tout a commencé quand j’ai découvert le nom des gens de ma classe. Il y avait une fille qui s’appelait comme ma petite sœur, donc je me suis installée à coté d’elle. Au début, elle était sympa. Elle me parlait de son copain, de ses sorties, de son club de danse… Et puis j’ai vite compris la raison de son apparente gentillesse. Elle voulait que je lui donne les réponses en classe. Elle ne travaillait jamais, elle disait ne pas avoir le temps. Comme elle avait remarqué que j’étais seule, elle savait que j’accepterai : elle m’intégrait dans sa bande d’amis et, en échange, je faisais son travail. Je voulais des amis, alors j’ai dit oui. Ce fut ma première erreur.

Un jour, je lui ai demandé de m’inviter à une de ses soirées où tous les gens populaires étaient réunis. Elle a refusé avec une réponse que je n’oublierais jamais : « Désolé, c’est pour les cool, pas pour les intellos comme toi. » J’ai compris à ce moment là qu’elle m’avait juste utilisée. Jamais elle n’avait été mon amie, jamais elle ne m’avait intégrée. Elle voulait juste profiter de mon travail. C’était trop pour moi. J’ai décidé de ne plus m’asseoir à coté d’elle et de ne plus faire ses devoirs. Ce fut ma deuxième erreur.

Elle était folle de rage que je l’abandonne. Après une série d’injures, elle m’a interdit d’approcher à nouveau sa bande d’amis.

Si elle en était restée là, j’aurais survécu. Mais il y a eu pire. Elle a commencé à m’appeler « la moche » devant tout le monde, devant toute la classe. Au début, elle était la seule. Et puis, petit à petit, ils ont tous commencé à m’appeler comme ça, dans les couloirs, à la cantine et devant les profs. C’était devenu mon nouveau prénom. Tout le monde trouvait ça drôle. Mais moi, ça me faisait beaucoup de mal. Je n’osais pas le dire à mes parents. Je voulais qu’ils pensent que tout se passait bien pour moi, qu’ils soient fiers de moi. À la maison, je souriais. Au lycée, je devenais « la moche ».

Plus je me renfermais sur moi même, plus c’était dur. Personne ne voulait traîner avec « la moche » au lycée. Alors, j’ai commencé à passer mes récrés dans les toilettes, pour ne plus rester seule. Le soir en rentrant, je pleurais souvent dans mon lit. Je trouvais ça injuste que tout ça soit arrivé parce que j’avais de bons résultats. Alors j’ai arrêté de travailler. Mes notes ont chuté. J’ai commencé à détester ma vie, à me trouver vraiment moche et nulle. Je parlais de moins en moins, je m’isolais. Je cachais cela à tous les adultes. J’avais honte de ce qui m’arrivait. Ma vie était devenue un enfer et je me sentais obligée de le vivre.

Ce que j’aurais aimé me dire à moi même à cette époque

Ma chère Eva. Tu es précieuse. Tu es unique. Crois-moi, cette fille qui te harcèle, tu ne la reverras plus jamais. Elle n’a pas le droit de gâcher tes journées de cette manière. Elle est malsaine envers toi. Rien n’est de ta faute, ne te culpabilise pas. Tu dois juste mettre un terme à cette situation. N’oublie surtout pas que ta vie ne s’arrête pas là, bien au contraire. Je sais que tu as l’impression que tout est si important à ton âge, et c’est vrai. Je sais que tu as envie d’espérer et de te réfugier dans un futur meilleur. Mais tu n’as pas le droit d’attendre que tout cela passe.

Parce que ta vie a de la valeur, tu dois faire le premier pas pour changer cette situation. D’autres personnes feront les pas suivants pour toi, ne t’en fais pas. Il faut juste que quelqu’un commence. Tu n’es pas seule, même si c’est ce que tu ressens. Tu peux être comprise, même si tu en doutes. Parles-en à tes parents, ou à un adulte de confiance. Si personne ne te vient en tête, parles-en à un chrétien, à un pasteur qui pourra prier pour toi. Parles-en à des professionnels qu’on peut appeler gratuitement et dont on trouve le numéro sur internet. En parler c’est la première étape. C’est la plus difficile. Mais ensuite, tu ne seras plus seule pour les autres étapes. Et tu verras que finalement, sortir d’une telle situation est beaucoup moins dur que tu ne l’imaginais. Tu ne me crois pas ? Essaie quand même. Ta vie en vaut le coup. Ta vie est précieuse.

« Tu as du prix à mes yeux, tu comptes beaucoup pour moi et je t’aime. » La Bible, Ésaïe 43.4

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  1. Le lycée est la dernière année d’études secondaires en France.

Eva

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1 Commentaire

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  • Votre article est on ne peut plus clair. Il résume parfaitement ce qu’il faut dire à ceux qui subissent comme à ceux qui en sont spectateurs. Bravo.

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